Depuis quelques semaines, des rumeurs persistantes circulent à N’Djaména et dans d’autres villes du Tchad concernant des prétendus vols d’organes génitaux attribués à des pratiques jugées mystérieuses ou surnaturelles. Ces récits, souvent qualifiés de légendes urbaines ou de croyances populaires, suscitent peur et psychose dans plusieurs quartiers. Face à cette situation, un élément inattendu refait surface comme symbole de protection : le charbon de bois.
Un climat d’angoisse populaire
Dans certains arrondissements de N’Djaména, la tension est palpable. Des hommes affirment avoir été victimes de « rapt sexuel », prétendant qu’un contact physique ou verbal avec une personne suspecte aurait entraîné la disparition ou la rétraction soudaine de leurs organes génitaux. D’autres parlent d’impuissance subite ou de « vol énergétique ». Ces cas, rarement prouvés scientifiquement, provoquent un réel traumatisme chez ceux qui les relatent.
Les réseaux sociaux amplifient la panique, relayant vidéos, témoignages et mises en garde. Ces récits, qu’ils soient exagérés ou sincères, trouvent un écho dans une population en quête de protection contre des menaces perçues comme invisibles.
Le charbon : croyance et bouclier symbolique
C’est dans ce contexte que le charbon de bois émerge comme un « élément protecteur ». Dans plusieurs quartiers, des habitants en glissent dans leurs poches ou leurs sous-vêtements, ou en déposent à l’entrée de leur maison. Dans certaines traditions africaines, le charbon est perçu comme un purificateur naturel, capable d’absorber les énergies négatives ou de repousser les esprits malveillants.
« Depuis que je garde un morceau sur moi, je me sens plus tranquille », confie Emanuel, 32 ans, clandoman à Gassi. « Même si c’est juste dans la tête, ça me rassure. »
Un phénomène à la croisée de la peur et de la culture
Des sociologues locaux analysent le recours au charbon comme une réponse symbolique face à un sentiment d’impuissance sociale. Dans un contexte où les institutions peinent à répondre à l’insécurité, certaines communautés se tournent vers des solutions traditionnelles ou spirituelles pour retrouver un sentiment de contrôle.
Une psychose collective ?
Le ministère de la Sécurité publique appelle au calme. Aucune preuve médicale ou judiciaire ne corrobore l’existence de véritables « vols d’organes génitaux » à N’Djaména. Selon certains médecins, ces cas pourraient relever de troubles psychosomatiques liés à la peur, au stress ou à des croyances profondément ancrées.
Le Contrôleur Général, porte-parole de la Police Nationale, Paul Manga, dénonce avec fermeté les violences extrajudiciaires et appelle la population au discernement. « Aucun individu ne peut aspirer un sexe à distance, comme s’il s’agissait d’un signal Wi-Fi », a-t-il déclaré avec ironie. Il a rappelé que toute personne se rendant coupable d’agressions fondées sur de simples suspicions sera poursuivie devant les juridictions compétentes.
Pourtant, la rumeur persiste. Dans un contexte de désinformation rapide, même des symboles aussi simples que le charbon de bois acquièrent une valeur défensive presque magique.
Qu’il soit perçu comme un objet de protection spirituelle ou un simple talisman psychologique, le charbon de bois s’est imposé dans certains quartiers de N’Djaména comme une réponse à une peur bien réelle, bien que difficile à prouver : celle des vols d’organes génitaux. Entre croyances populaires, tensions sociales et quête de repères, ce petit morceau noir incarne à lui seul la fragilité des communautés face à l’invisible.
À N’Djaména, le charbon de bois : un bouclier symbolique face aux rumeurs de vols d’organes génitaux
À N'djaména, des rumeurs sur des "vols d'organes génitaux" sèment la panique.
Face à cette peur collective, un objet inattendu s'impose comme protection : le charbon de bois.
Simple superstition ou mécanisme de défense symbolique ?
Un phénomène fascinant à la croisée de la culture, de la peur et de la survie.
